Dennis Ang’ani

Dennis Ang’ani

Cuisinier

Je m’appelle Dennis Ang’ani. J’ai 24 ans et je suis Kenyan. Je suis né et ai grandi au Kenya d’un père métis Kenyan-Allemand et d’une mère Kenyane. Je m’identifie ainsi au multiculturalisme et parle anglais, swahili, allemand et espagnol. Je réside au Kenya, mais j’ai vécu dans quelques pays en Europe, Les Pays Baltes et quelques endroits en Amérique du Nord. J’ai étudié les arts culinaires à International Hotel and Tourism Institute et j’ai terminé mes études en 2013.
Mon amour pour les arts culinaires provient de mon amour du football. Depuis mon plus jeune âge jusqu’à mes 16 ans, je rêvais de devenir footballeur et j’ai travaillé dur pour poursuivre ce rêve. Je me souviens avoir assisté à un programme à la télévision qui présentait des chefs qui faisaient leur travail en montrant des aspects de celui-ci tels que le travail en équipe, le flair, la pression, la cohésion dans leurs cuisines. Pour moi, cela est similaire aux conditions d’évolution d’un footballeur. J’ai vu le Chef comme l’entraîneur-chef, le capitaine d’équipe comme le sous-chef et les joueurs comme le chef de parties, demis et commis et là, j’ai accroché à cette idée de cuisine.
J’ai donc rejoint une école culinaire où j’étais le seul qui ne savait pas cuisiner, tenir un couteau et toutes les questions liées à la cuisine. Mais avec de la persévérance, je me suis retrouvée à obtenir les deuxièmes meilleurs résultats dans les examens de cuisine. Cela a renforcé mes rêves et m’a donné l’envie de posséder à mon tour un jour mon propre restaurant.  

J’ai d’abord été formé, sous la direction du maître culinaire Luca Alvarez Molteni et de Sarah Molteni (propriétaires des Grands Chefs au Canada) en pâtisserie. Depuis, j’ai travaillé dans des hôtels cinq étoiles, des bateaux de croisière, chez un chef privé de délégués brésiliens et un consultant en chef de différents hôtels et restaurants. J’ai visité l’Italie, l’Allemagne, l’Espagne, le Mexique, les États-Unis, la Jamaïque, les Pays-Bas, la Croatie et bien d’autres pays. Mais c’est ma rencontre avec la culture latine qui m’a le plus influencée. D’abord parce que ce sont des gens qui m’ont accueilli comme chez moi alors que j’étais à l’étranger et ensuite parce que dans ma zone de travail immédiate, 50% de mes collaborateurs étaient d’origine latine.
Cette influence a eu un effet sur le chemin que j’ai suivi dans ma cuisine car il y a de nombreuses similitudes entre les cultures culinaires latines et africaines notamment dans la façon de cuisiner, les ingrédients, l’art de manger et d’interagir autour du repas. Je peux donc dire aujourd’hui que j’ai une inclinaison pour la culture afro-latine tout en restant libre et ouvert aux autres cultures. Je note cependant que je me sens obligé de me rapprocher de la cuisine africaine car elle m’inspire et elle incite au dialogue.  


En tant que professionnel, je tire évidemment mon inspiration auprès des plus grands chefs du monde. Mais je ne vous cache pas que je me sens dans mon élément quand j’écoute de la musique orchestrale. Je me considère comme un maestro et son orchestre (un chef et son équipe) lorsque j’écoute de la musique orchestrale. Je fais des rapprochements entre la symphonie musicale et harmonieuse de l’orchestre, le travail acharné et la camaraderie qu’il faut pour réaliser un morceau et le jouer à la perfection et mon travail dans la cuisine. Je citerai quelques sources d’inspiration pour la réalisation des plats: Leonard beinstein, Nick bejic, Rossini, Offenbah, Ricardo Mutti … et la liste continue.
Pour moi, la cuisine est un jeu, la cuisine est amusante, la cuisine est le bonheur, la cuisine est un dialogue, la cuisine est beaucoup plus que simplement manger. C’est quelques choses qui bouleverse dans le sens positif . Pour moi, la cuisine est inexplicable car elle est un paradoxe entre ce qui est et ce qui n’est pas. C’est pourquoi,  je compte uniquement transmettre une expérience unique à mon convive. Mon objectif est d’évoquer un jour l’émotion de mes convives de la même manière que les morceaux d’orchestre évoquent l’émotion des auditeurs. Je veux que mes invités puissent raconter leur expérience de ma cuisine au niveau des émotions qui ravivent leurs vies. Vais-je jamais atteindre cela? Je ne sais pas, mais c’est quelque chose que je cherche.

Tout d’abord en tant qu’Africain, puis en tant que chef africain, j’ai toujours rêvé de montrer au monde ce que nous avons. La culture de l’appréciation des aliments est faible, mais de plus en plus de chefs, s’orientent dans cette direction. Je sens que nous sommes encore très jeunes gastronomiquement ainsi les chefs ont maintenant la liberté et l’espace pour créer et même intégrer de nouveaux plats à la cuisine africaine. C’est mon objectif avec d’autres chefs africains : nous réunir et lier ensemble nos mondes multiculturels pour donner une voix à notre cuisine. Ce serait une étape incroyable lorsqu’un jour, au lieu d’adopter des cultures occidentales, des cultures orientales, etc., nous pourrions plutôt partager notre culture avec ces parties du monde qui, en fin de compte, contribuent non seulement à l’Afrique mais aussi à l’ensemble du monde de la gastronomie. Je pense sincèrement que nous avons les ressources, les ingrédients et l’espace pour le faire, donc prenons notre temps pour aiguiser nos esprits.

Je m’inspire surtout du travail du chef brésilien Alex Atala (en partie parce que je suis affilié à la cuisine brésilienne) parce qu’il a été le premier à venir au devant et dire qu’il utiliserait des ingrédients brésiliens pour révolutionner la cuisine brésilienne. L’autre est Gaston Acurio qui a posé la fameuse question « pourquoi faisons-nous la cuisine française sans être français?”  Ce sont deux (2) personnes qui ont permis de (en compagnie de Ferran Adria, Aduriz Andoni, Joan Rocca, etc.) donner à la cuisine latine une voix. Mon rêve est que nous puissions, aussi, un jour, donner à la cuisine africaine sa voix.

Personnellement, en tant que Chef, j’essaie autant que je peux d’utiliser des «ingrédients africains» tout en les mélangeant à des méthodes de cuisine occidentales et locales selon ce que je veux  réaliser. L’objectif n’est pas d’isoler l’Afrique, mais plutôt de la rejoindre aux cuisines du monde. Avec cela, je communique avec un petit groupe de chefs, locaux et internationaux, qui sont mes amis, pour aider à construire un pont entre nous et nous faire apprendre et partager. En fin de compte, c’est mon rêve de travailler avec plus de chefs africains qui ont cette même mentalité et de voir où nous pouvons aider à déplacer ce navire.